LA MÈRE POULARD: l'histoire
Édouard Corroyer est un grand architecte français, élève de Viollet-le-Duc. Annette, fille de maraîchers originaires de Nevers, entre à son service à Paris en qualité de femme de chambre puis de cuisinière. Édouard Corroyer est un fin gourmet, qui reçoit beaucoup et aime faire plaisir à ses hôtes. Il détecte rapidement les talents de cuisinière d’Annette, lui parle des plats qu’il aime.
La Mère Poulard symbolise une longue tradition d’hospitalité. Elle reçoit tous ses hôtes avec la même gentillesse, la même hospitalité et le même goût du partage, qu’ils soient célèbres ou non. L’abbé Couillard, curé du Mont-Saint-Michel, décrit Annette comme une mère qui reçoit ses enfants, avec empressement et une simplicité sans détour. Elle reçoit aussi les grands noms de l’époque, qui viennent au Mont-Saint-Michel depuis qu’il a été réhabilité par Édouard Corroyer. En cette fin du XIXème siècle, la côte normande est l’équivalent de la Côte d’Azur d’aujourd’hui. C’est là que les familles royales et princières d’Angleterre ont leurs demeures secondaires, bientôt rejointes par le gotha des rois, des princes et des aristocrates d’Europe. On y côtoie également les grands chefs d’entreprise ayant fait fortune, les artistes, les peintres et les écrivains.
Annette tient l’auberge de main de maître et, si elle n’hésite pas à faire crédit aux pauvres, elle est intraitable sur certaines règles. Les repas, par exemple, sont pris à l’étage et le café, servi sur de petites tables en extérieur. On raconte qu’un jour de visite au Mont-Saint-Michel, le roi des Belges Léopold II voulut déjeuner dehors ; Annette Poulard lui fit comprendre avec une douceur ferme que cela était impossible… et il prit son repas à l’intérieur !
La Mère Poulard ne quitte jamais ses fourneaux et ne s’éloigne que très peu du Mont-Saint-Michel ; ses voyages, elle aime les faire en rêve, en écoutant ses hôtes venus du monde entier. Elle prend l’habitude de leur demander, en souvenir de leur passage, une photo, une dédicace ou un dessin qui lui permettent de continuer à voyager avec eux, la tête remplie de tous ces souvenirs et de toutes ces rencontres qu’elle affectionne tant. La tradition s’est perpétuée jusqu’à nos jours et une collection de nombreuses photographies, dessins, portraits, signatures et dédicaces anime les murs de l’auberge ; ils sont une invitation au voyage à travers le temps et à travers l’histoire.
Ainsi peut-on découvrir que le roi Édouard VII et la famille royale d’Angleterre, hôtes assidus de La Mère Poulard au début du XXème siècle, contribuèrent beaucoup à sa renommée. Le président des États-Unis Theodore Roosevelt et le président du Conseil français Georges Clemenceau – héros de la Première Guerre mondiale, grand ami d’Annette Poulard et grand amateur de sa cuisine – contribuèrent eux aussi à cette renommée naissante.
Ernest Hemingway, écrivain américain et correspondant de guerre très engagé, reprit des forces à la table de La Mère Poulard pour décrire les faits d’armes du débarquement, dont la fameuse trouée du général Patton qui fut l’une des batailles décisives pour la libération de la France et de l’Europe et qui se déroula à quelques kilomètres du Mont-Saint-Michel, au niveau de la ville d’Avranches alors entièrement détruite.
Annette Poulard aurait également apprécié le commentaire fait quelques années plus tôt par le chanteur français Maurice Chevalier, bon vivant, décrivant ainsi son séjour : « Endroit splendide – bonne croûte – bon service – patrons charmants – Je reviendrai ! »
Car La Mère Poulard appartient aussi aux artistes amoureux du Mont et de l’auberge mythique. On en citera quelques-uns, à la manière d’un poème de Prévert, par ailleurs grand amateur de la maison : Claude Monet, Pablo Picasso, Bernard Buffet, Foujita, Jean Cocteau, Marcel Pagnol, André Malraux, Françoise Sagan, Rita Hayworth, Lauren Bacall, Glenn Close, Eric Von Stroheim, Clarck Gable, Jean Gabin, Yves Montand, Jean- Paul Belmondo, Charlton Heston, Woody Allen, Juliette Binoche, Sophie Marceau, Charlotte Ram- pling, Eva Longoria, Philippe Noiret, Jean Roche- fort, Michel Piccoli, Arthur Rubinstein, Dalida, Florent Pagny, Jean-Michel Jarre, Coco Chanel, Christian Dior, Yves Saint Laurent, Inès de la Fressange, Laetitia Casta…
Et nous laisserons bien sûr la conclusion au pape de la cuisine française, Paul Bocuse, pour qui « La Mère Poulard, c’est la France ».
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